3 Présentation de Chou fleurs et pissenlits
A Uzès, « Chou-fleurs et pissenlits »
Le groupement d'achats alimentaires « Choux-fleurs et Pissenlits » est né il y a 4 ans dans la région d'Uzès (Gard). Les objectifs au départ étaient surtout de faciliter l'accès à une nourriture locale de meilleure qualité et à des prix accessibles. Nous avions mis en place des visites chez des producteurs histoire de créer un petit répertoire sur notre site internet et contacté un grossiste pour les produits secs.
La première commande rassembla trente personnes qui expérimentaient une organisation collective et horizontale n'excluant pas la bonne humeur. Aujourd'hui, environ 110 adhérent-es ont recours à « Chou fleurs et pissenlit ». Les réunions, conviviales, avec repas tirés du sacs, forment une sorte de rituel très apprécié. Un site internet permet la prise des commandes qu'un-e adhérent-e prend à sa charge pour nous les livrer au cours d'un rendez vous trimestriel.
Les prises de décision se font à l'unanimité avec recherche du consensus. Des commissions peuvent être créées suivant les besoins comme soutenir un poste ou diviser les tâches par exemple, ce qui permet des mandats plus légers et plus conviviaux. L'Association loi 1901 vit grâce à une cotisation faible (5 euros par an) et à des actions ponctuelles telles que concerts, repas...
Au fur et à mesure, d'autres directions ont été prises par le Collectif, à partir des souhaits des adhérent-es : des chantiers solidaires d'abord avec des producteurs puis avec des adhérent-es ; des émissions de radio, des stands de présentations..., marquant la volonté d'ouvrir l'Association.
Le fonctionnement est devenu progressivement plus complexe, plus fin aussi, et des conflits, des difficultés,sont apparus inévitablement. Ce qui est demandé à « Choux-fleurs et pissenlits » varie selon les personnes ; certains veulent de l'anticapitalisme et recherchent l'autogestion ; d'autres gardent un comportement consumériste et passif. Parmi les sujets brûlants : extension ou non des objets de l'Association, fonctionnement de type classique (Conseil d'Administration, etc...) ou plus horizontal et informel, la facilitation de la rotation des tâches et de l'implication des adhérent-es... Au fond, des objets de polémiques assez classiques, mais auxquels on n'est pas vraiment prêts à répondre correctement et rapidement.
Dans la diversification des fonctions du groupement d'achat, il y avait une volonté de faire se rencontrer des adhérents de divers groupements au cours d'une journée, pour faire connaissance, et pour comprendre ce qui nous motivait. Cette journée s'est tenue en juillet 2012 et a pu réunir 18 personnes provenant de 5 groupements.
Au cours du débat de 4 heures qui a suivi la projection du film « Court-circuit » (présentation d'une AMAP de St Denis), on a pu se rendre compte de l'énorme besoin de débattre et de connaître les uns et les autres. On y a parlé de la question pratique concernant l'accès aux produits et la création d'ateliers divers ; mais aussi des questions d'ordre idéologique tels que l'accès à la terre, la légalité, les inégalités sociales dans les groupements d'achats, le désir de créer un fonctionnement radicalement différent de celui que nous impose le capitalisme. La journée s'est terminée par la décision de créer une liste électronique de diffusion et d'organiser une autre rencontre du même type.
Entre autres questions, on a débattu de la volonté d'institutions comme l'INRA ou la Région Languedoc Roussillon, encouragées par des fonds européens, de récupérer nos dynamiques. Pour ces institutions, la démarche est de « ...comprendre [ ] à quelles conditions les circuits courts de commercialisation peuvent aider les acteurs du milieu agricole et du territoire régional à répondre aux enjeux de compétitivité et de développement durable de la région en complémentarité avec les circuits long ». On peut craindre que l'État et le Capitalisme cherchent à analyser ces nouveaux fonctionnements pour tenter de les contrôler.
L'inquiétude est forte de voir dissocier la pratique des GA de la critique fondamentale du système dominant. Malgré tout, nous ne pouvons nier les impacts de ce genre de mouvement de consommation. Saurons nous en garder l'initiative ou sommes nous déjà encadrés par les institutions qui drainent le capitalisme ? Quelles fonctions les libertaires donnent-ils à ces groupements ?
Plus globalement, on a l'impression que cette volonté d'intégration des circuits courts s'inscrit dans une évolution économique et surtout sociale : par ses recherches ou son soutien, le fond social européen prétend « lutter contre toutes les formes de discrimination et réduire les inégalités entre les régions et entre les populations sur le plan à la fois économique et social ». Nous avons peut-être là un énorme rôle à jouer pour permettre à ces réflexions de dépasser le cadre imposé par le capitalisme.
Dans tous les cas, nous pouvons prévoir que l'État ne tardera pas à mettre en place de nouvelles façons de fonctionner, développées à partir de ces analyses sur les circuits courts. À nous de savoir quelles pratiques et quelles idées nous voulons mettre en œuvre pour fleurir ce champ des possibles de façon plus libertaire.
Tristan (Groupe Gard Vaucluse de la FA)
Catégorie : Dossiers à thèmes - 3. Dossier Autogestions et Groupements d'achats alimentaires (octobre 2012)
Page lue 44235 fois